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Révolution législative contre la “terreur routière” : amendes millionnaires et peines pouvant atteindre 20 ans de prison

L’Algérie s’apprête à opérer un tournant majeur dans la lutte contre la violence routière. Le ministère de l’Intérieur, des Collectivités locales et des Transports finalise un nouveau projet de loi sur la circulation routière, présenté comme une véritable révolution législative destinée à mettre un terme à l’hémorragie humaine et aux pertes matérielles causées quotidiennement sur les routes.

Selon les amendements consultés par Echorouk Online, le projet de loi — qui compte 190 articles — ne se contente pas de durcir les sanctions existantes. Il crée de nouvelles infractions, étend la responsabilité pénale à de nouveaux acteurs et instaure un arsenal répressif inédit, avec des peines pouvant aller jusqu’à 20 ans de prison et des amendes atteignant 2 millions de dinars.

Un dispositif de sanctions ferme et progressif : frapper fort pour dissuader

Le texte revoit en profondeur l’architecture pénale, classant les infractions en contraventions, délits et crimes, assortis de sanctions financières et privatives de liberté très sévères, sans possibilité d’allégement dans certains cas.

Les sanctions les plus lourdes concernent les infractions portant atteinte à la vie et à la sécurité des personnes, notamment les homicides et blessures involontaires :

Principales dispositions pénales :

  • Homicide involontaire (art. 124) : de 1 à 5 ans de prison, portée à 7 ans en cas d’utilisation d’un poids lourd ou d’un véhicule de transport collectif.
  • Homicide involontaire avec circonstances aggravantes (art. 125) : jusqu’à 10 ans et 1 million DA d’amende en cas de fuite, conduite sans permis valide, usage du téléphone ou manœuvre dangereuse.
  • Homicide involontaire sous influence (art. 126) : jusqu’à 12 ans et 1,2 million DA lorsque le conducteur est sous l’effet d’alcool ou de stupéfiants.
  • Peine maximale (art. 129) : 20 ans de prison et 2 millions DA contre un conducteur de poids lourd ou de transport collectif causant la mort de deux personnes ou plus avec circonstances aggravantes.
  • Blessures involontaires (art. 130-134) : de quelques mois à 10 ans de prison pour les conducteurs professionnels sous influence et en présence d’autres facteurs aggravants.

Responsabilité élargie et nouvelles infractions : plus personne n’est intouchable

Pour la première fois, la loi inclut dans le champ de responsabilité des acteurs jusqu’ici peu inquiétés :

  • Centres de contrôle technique et experts des mines (art. 154) : jusqu’à 7 ans de prison en cas d’accident mortel lié à un certificat de conformité frauduleux.
  • Auto-écoles et inspecteurs du permis (art. 155) : jusqu’à 8 ans en cas de délivrance complaisante d’un permis ayant conduit à un accident mortel.
  • Fabricants, importateurs et vendeurs de pièces détachées contrefaites (art. 156) : jusqu’à 7 ans si la pièce défectueuse est à l’origine d’un décès.
  • Responsables de la construction et de l’entretien routier (art. 61) : responsabilité civile obligatoire en cas d’accident causé par un défaut de conformité ou de maintenance.

Guerre totale contre la conduite sous influence

Le texte impose des mesures strictes pour éradiquer la conduite sous l’effet d’alcool ou de stupéfiants, considérée comme un facteur majeur d’accidents.

  • Analyses obligatoires (art. 68 et 71) : test médical obligatoire pour l’obtention ou le renouvellement du permis.
  • Contrôle renforcé des conducteurs professionnels (art. 80) : tests obligatoires à l’embauche, contrôles réguliers et inopinés pour conducteurs de poids lourds, bus, taxis, transport scolaire ou matières dangereuses.
  • Refus de test (art. 143) : puni comme une conduite en état d’ivresse ou sous stupéfiants.

Organisation des conducteurs et véhicules : nouvelles règles strictes

Permis de conduire :

  • Période probatoire (art. 69) : 2 ans durant lesquels aucun nouveau permis ne peut être obtenu.
  • Annulation du permis (art. 161) : obligatoire en cas d’homicide involontaire. Annulation automatique si l’infraction survient pendant la période probatoire.

Équipement des véhicules :

  • Vitrage teinté (art. 84) : interdiction stricte de toute forme d’assombrissement des vitres.
  • Chronotachygraphe (art. 85) : obligatoire pour les poids lourds (3,5 t et plus) et les véhicules transportant plus de 9 passagers.

Un dispositif institutionnel intégré pour un suivi continu

Le projet crée un cadre institutionnel solide pour garantir l’application effective de la loi :

  • Conseil national de la sécurité routière (art. 47) : élaboration de la stratégie nationale et adoption de décisions exécutoires.
  • Délégation nationale à la sécurité routière (art. 48) : organe exécutif chargé de la coordination.
  • Cellules communales de veille (art. 49) : structure locale chargée de détecter les “points noirs” routiers et d’intervenir immédiatement.

Vers une stratégie globale : prévention, dissuasion et rigueur

Avec cette nouvelle loi, l’Algérie passe d’une simple gestion du trafic à une véritable politique nationale de sécurité routière, mêlant prévention, contrôle strict et sanctions sévères.

L’objectif : mettre un terme au fléau endémique des accidents de la route, considéré comme l’une des principales causes de mortalité dans le pays.

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