Industrie automobile : une ruée des constructeurs étrangers vers l’Algérie, mais peu de concrétisations
Depuis plusieurs mois, les annonces de projets de construction automobile en Algérie s’enchaînent, portées par les visites de délégations étrangères et leurs partenaires locaux auprès du ministère de l’Industrie. Ce ballet diplomatique et industriel, amorcé sous l’ancien ministre et intensifié depuis la nomination de Sifi Ghrieb en novembre 2024, donne lieu à un véritable « défilé » de prétendants à l’implantation dans le pays, sans pour autant déboucher systématiquement sur des accords concrets.
Mercredi dernier, c’est une délégation du constructeur chinois Jaecoo-Omoda, filiale de Chery, accompagnée de son partenaire algérien Cars Tech (filiale de Iris Tyres), qui a été reçue par le ministre pour présenter un projet d’usine automobile. Une initiative qui s’inscrit dans une dynamique amorcée dès janvier dernier, avec des rencontres successives impliquant Hyundai, Jetour, Great Wall, Sokon, JAC, ou encore BAIC.
Jetour, en tête de course
Parmi tous ces projets, celui de Jetour semble le plus avancé. Le constructeur chinois a officialisé son partenariat avec Fondal, filiale de la Société nationale de sidérurgie (SNS), lors du forum algéro-chinois du 15 avril 2025 à Alger. Il bénéficie d’une infrastructure déjà existante : l’ex-usine Gloviz de Batna, saisie par la justice et désormais réaffectée à Fondal. Des essais techniques y ont été réalisés, et un rappel du personnel de l’ancienne unité a même été amorcé.
Jetour projette un investissement de plus de 105 millions USD sur cinq ans, avec une capacité de production de 270 000 véhicules par an et la création d’environ 1 000 emplois.
Hyundai, projet soutenu au plus haut niveau
Autre projet en bonne voie : Hyundai Motors Algeria, fruit d’un partenariat entre le constructeur coréen et le groupe omanais Saud Bahwan. Reçu à deux reprises par le ministre, en mars et en mai 2025, le projet a franchi l’étape de l’accord préalable, dernière étape avant l’obtention de l’agrément définitif.
Hyundai prévoit un investissement de près de 400 millions de dollars pour la production de trois modèles de véhicules particuliers, deux utilitaires et un éventuel modèle électrique. Le projet intègre dès sa conception des lignes de construction de carrosseries et de peinture, illustrant une volonté de s’ancrer durablement dans le tissu industriel national. Il bénéficie en outre d’un appui présidentiel direct, le chef de l’État ayant demandé un suivi rigoureux du partenariat algéro-omanais.
Les autres projets à l’étude
Le 19 mai dernier, une délégation du constructeur chinois Great Wall et de son partenaire algérien a également été reçue par le ministère. Une semaine plus tard, une visite du site Uno à Aïn Defla, ex-dédié à la grande distribution, a été organisée pour les représentants chinois, avec l’annonce de travaux de réhabilitation.
Le projet de Sokon, accueilli le 9 mai par le wali de Batna, se veut tout aussi ambitieux. Une société algérienne Sokon devrait voir le jour, avec un démarrage annoncé dans un délai d’un an. Toutefois, aucun agrément officiel n’a encore été délivré.
Par ailleurs, JAC affirme avoir finalisé 75 % de ses installations techniques à Aïn Témouchent, tandis que BAIC attend toujours le feu vert pour relancer ses activités à Batna, après une interruption administrative.
Beaucoup d’annonces, peu de réalisations
Si la dynamique autour du secteur automobile est indéniable, force est de constater que peu de projets se concrétisent jusqu’ici. En dehors de Jetour et Hyundai, qui semblent en tête de course, la plupart des autres initiatives restent à l’état de négociation ou de projet en attente d’agrément.
Les autorités locales participent aussi à cette effervescence, certains walis n’hésitant pas à annoncer des dates de démarrage avant même la finalisation des procédures administratives.
L’Algérie apparaît aujourd’hui comme un terrain convoité par les constructeurs étrangers, mais les autorités semblent déterminées à avancer prudemment, en privilégiant les projets viables et structurants, capables de générer une réelle valeur ajoutée pour l’économie nationale.