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Recyclage des déchets en Algérie : un potentiel économique immense encore sous-exploité

La filière du recyclage des déchets en Algérie affiche un dynamisme entrepreneurial notable, avec près de 20 000 opérateurs actifs. La ministre du Commerce intérieur et de la Régulation du marché national, Amel Abdellatif, a mis en avant cette évolution lors de l’ouverture de la 9ᵉ édition du Salon international de la récupération et de la valorisation des déchets (Revade) au Palais des expositions des Pins maritimes. Le nombre d’entreprises inscrites au CNRC est passé de 14 229 en 2020 à 19 469 aujourd’hui, illustrant l’intérêt croissant de la jeune génération pour l’économie circulaire. Cette progression est soutenue par les facilités offertes pour la création de start-up et de micro-entreprises, accompagnées par des structures telles que la Nesda et l’Angem, ainsi que par l’adaptation des codes d’activités au registre du commerce.

Pour la ministre de l’Environnement, Kaouter Krikou, le développement d’un écosystème national intégré de gestion des déchets, favorisant l’innovation et les partenariats public-privé, constitue une priorité, y compris à l’échelle africaine. Le ministre Noureddine Ouadah a quant à lui insisté sur le rôle des technologies modernes pour transformer les déchets en ressources utilisables dans des secteurs vitaux comme l’agriculture.

Une filière encore sous-exploitée malgré un gisement colossal

Malgré cette effervescence entrepreneuriale, la filière reste largement sous-exploitée. L’Algérie génère chaque année 34 à 36 millions de tonnes de déchets, mais le taux de recyclage ne dépasse pas 10 à 12 %. Pour les déchets ménagers et assimilés (DMA), estimés à 12,6 millions de tonnes en 2022 et susceptibles d’atteindre 70 à 75 millions de tonnes par an d’ici 2035, la valorisation réelle reste limitée à 7-10 %. Cette non-valorisation représente une perte économique considérable : la valeur marchande des déchets récupérables a été estimée à 207 milliards de DA en 2023, alors que la gestion des DMA coûte à l’État près de 73 milliards de DA par an.

Les principaux freins au développement de la filière

Plusieurs obstacles entravent l’essor du recyclage, malgré la Stratégie nationale de gestion intégrée des déchets (SNGID) visant à valoriser 47 % des DMA et créer 30 000 emplois directs d’ici 2035. Le déficit d’infrastructures de tri et de valorisation reste un enjeu majeur, la collecte sélective à la source n’étant pas généralisée et entraînant une forte contamination des matériaux recyclables. Le recours massif aux Centres d’enfouissement technique limite également la qualité des flux recyclables.

La matière organique constitue 76,3 % des DMA, mais seulement 1 % de cette fraction est aujourd’hui valorisée par compostage ou biométhanisation, alors que son exploitation pourrait soutenir l’agriculture et la production d’énergie. Le secteur informel joue par ailleurs un rôle central dans le tri et la collecte, mais sa non-intégration réduit l’efficacité et la traçabilité du système. Enfin, la gestion des déchets par les collectivités locales nécessite une meilleure structuration, basée sur des plans directeurs et des schémas intégrés.

Vers une économie circulaire pleinement opérationnelle

Les chiffres récents témoignent néanmoins du potentiel entrepreneurial et du gisement important dont dispose l’Algérie. Transformer cette « mine d’or » en véritable moteur économique passe par la modernisation des infrastructures, l’intégration des acteurs informels, la généralisation du tri sélectif et l’accélération des investissements. Ces leviers sont essentiels pour faire du recyclage un pilier concret de l’économie circulaire et de la diversification économique nationale.

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