Maroc : la répression fait deux morts et des centaines de blessés au cinquième jour de soulèvement
Le Maroc traverse l’une des plus graves vagues de contestation de son histoire récente. Cinq jours après le déclenchement d’un mouvement de révolte conduit par des jeunes se réclamant du collectif GenZ 212, la répression a atteint un tournant sanglant. À Lqliâa, près d’Agadir, deux manifestants ont été tués par balles alors qu’ils participaient à une tentative d’attaque contre un poste de gendarmerie.
Escalade meurtrière
Selon des sources concordantes, les forces de la Gendarmerie royale ont ouvert le feu à balles réelles, causant la mort de deux jeunes et plusieurs blessés graves. Ce recours aux armes létales marque une nouvelle étape dans la réponse sécuritaire du régime, jusque-là concentrée sur des arrestations massives et l’usage de la force non létale.
Le ministère de l’Intérieur a confirmé un bilan particulièrement lourd : près de 300 blessés recensés depuis mardi soir, dont plusieurs dizaines parmi les manifestants. Parallèlement, plus de 400 interpellations ont été enregistrées à travers le pays.
Un climat insurrectionnel
Les grandes villes marocaines connaissent une agitation inédite : Rabat, Casablanca, Oujda, Beni Mellal, Inezgane et Agadir sont secouées par des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. Des véhicules de police incendiés, des locaux administratifs et bancaires saccagés, ainsi que des barricades dressées dans plusieurs quartiers témoignent d’un climat quasi insurrectionnel, du jamais-vu depuis le Hirak du Rif.
Face à cette colère, les autorités dénoncent des « casseurs » armés de cocktails Molotov, de pierres et d’armes blanches. Mais pour de nombreux observateurs, le mouvement traduit un ras-le-bol généralisé face au chômage endémique, aux difficultés du système éducatif et sanitaire, ainsi qu’à la corruption.
La jeunesse contre le Makhzen
Le collectif GenZ 212 insiste sur le caractère pacifique de son action et accuse la répression policière d’avoir provoqué les violences. Il dénonce la stratégie du pouvoir qui, selon lui, instrumentalise les affrontements pour justifier l’usage de la force.
Le gouvernement dirigé par Aziz Akhannouch, déjà critiqué pour sa proximité avec les cercles d’affaires et sa gestion de la crise sociale, vacille sous la pression. Le chef du gouvernement, symbole d’un système économique jugé inégalitaire, est de plus en plus visé par les slogans des manifestants.
Un régime fragilisé
Avec deux morts, des centaines de blessés et des arrestations massives, le régime montre les limites de son modèle basé sur la répression et la concentration des richesses. La contestation actuelle dépasse le simple cadre social et met en lumière une crise structurelle du makhzen.
Cinq jours de colère ont suffi à plonger le royaume dans une situation explosive, où la jeunesse, moteur de la contestation, exige désormais bien plus qu’un changement conjoncturel : elle réclame un avenir digne, débarrassé de la corruption et de l’injustice sociale.
