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Première Édition des Journées Nationales du Duodrame : Une Exploration du Théâtre Contemporain à Saïda

Par : Amani H.

Le Théâtre régional Sirat-Boumediène de Saïda a été le théâtre des spectacles en compétition lors de la première édition des Journées nationales du Duodrame, un événement culturel qui a mis en lumière la richesse et la diversité de la scène théâtrale algérienne contemporaine. Les pièces présentées ont oscillé entre comédie satirique, réflexion philosophique et absurdité poétique, offrant une plongée fascinante dans les enjeux humains et sociaux de notre époque.

L’ouverture de ces journées a été marquée par la présentation de « Tik Tikou », une production de l’association Chouâa pour la culture et la création de Bordj Bou-Arréridj. Mise en scène par Sofiane Attia, cette pièce repose sur un duo d’acteurs, Ayoub Thayri et Mounir Ayi, qui portent l’histoire avec une grande énergie. « Tik Tikou » mêle satire sociale et réflexions existentielles, tout en s’appuyant sur un comique de situation qui dépeint la complexité des relations familiales et des quiproquos qui en découlent. L’intrigue met en scène un veuf et son fils, cohabitant dans une maison marquée par l’absence féminine et un manque de chaleur familiale. Le père, en quête d’une nouvelle compagne pour combler son vide affectif, se retrouve pris dans un quiproquo avec son fils, qui, de son côté, cherche à fonder une famille. La pièce joue sur l’absurde, avec un rebondissement final qui souligne l’irrationalité des situations de la vie quotidienne. Le décor minimaliste, composé de quelques éléments domestiques, a permis aux comédiens de briller dans leur jeu, offrant une prestation marquée par une gestuelle expressive et des dialogues effervescents.

Le lendemain, c’est « Dik Al Mazabel », une production de l’association Chabab El Fen, qui a pris place sur les planches. Écrite par Talal Nasser Eddine et mise en scène par Aïssa Djekati, cette œuvre propose une rencontre improbable entre deux âmes solitaires dans une décharge, un lieu aussi concret que métaphorique, symbolisant la dégradation et l’abandon. L’histoire tourne autour d’un vieil homme, gardien de ce lieu de désolation, qui brise sa solitude en inventant un monde parallèle. Son quotidien monotone est bouleversé par l’arrivée d’un jeune homme désespéré, venu mettre fin à ses jours. Ce face-à-face entre deux êtres que tout oppose évolue en un échange humain profondément émouvant, où se dessinent des réflexions sur la vie, les regrets et la fatalité. L’interprétation de Larbi Aïssa Sidali et Mohamed Chakib Khier, respectivement dans les rôles du vieil homme et du jeune homme désespéré, a été particulièrement touchante, donnant au public un aperçu de l’humanité derrière chaque souffrance.

Parmi les œuvres les plus marquantes de cette édition, « Asderfef », produite par la coopérative théâtrale « Machahou », a capté l’attention des spectateurs par son traitement de l’absurde et du tragique. Adaptée du texte « Les Chaises » d’Eugène Ionesco et écrite en tamazight par Sadek Yousfi, la pièce est une exploration poignante de l’ennui, du vieillissement et de la quête de sens. Interprétée par Fariza Chemakhe et Rahmouni Ouziane, « Asderfef » met en scène un couple vieillissant, enfermé dans une routine où le temps semble suspendu. Pour échapper à l’ennui, ils répètent sans cesse les mêmes scènes et se replongent dans des souvenirs de jeunesse. Le vieil homme, artiste marginalisé, aspire à transmettre un message universel avant sa mort et convoque des invités imaginaires pour partager sa vision du monde. Cependant, au fur et à mesure que la pièce progresse, une ironie tragique s’installe, culminant dans une scène d’une grande intensité émotionnelle. Le dispositif scénique minimaliste, dominé par des chaises vides qui envahissent progressivement la scène, accentue le sentiment d’absurdité et d’incommunicabilité entre les personnages. La complicité palpable entre les deux comédiens, et la richesse de leur interprétation, ont fait de « Asderfef » le spectacle le plus abouti et le plus acclamé de cette édition des Journées du Duodrame.

Au total, cette première édition des Journées nationales du Duodrame a permis de célébrer non seulement la créativité et la diversité des auteurs et metteurs en scène algériens, mais aussi la capacité du théâtre à aborder des questions profondes et universelles à travers la forme du duo. Les pièces présentées ont été un bel hommage à la fois à la richesse de la culture algérienne et à la puissance du théâtre en tant qu’art de l’âme et de la réflexion.

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