Une campagne de désinformation visant l’Algérie prend de l’ampleur en Tunisie
Les réseaux sociaux tunisiens ont été récemment le théâtre d’une vaste campagne de désinformation et de diffusion de fausses informations visant à impliquer l’Algérie dans les débats et tensions politiques internes en Tunisie. Cette campagne, largement relayée sans vérification, a vu la participation de militants et de personnalités politiques, y compris certains résidant à l’étranger.
Depuis mardi, des tentatives de manipulation politique ont émergé à travers la diffusion de vidéos montrant l’arrivée d’autobus transportant des touristes algériens à Tunis. Ces images ont été utilisées pour prétendre, à tort, qu’il s’agissait de manifestants acheminés pour participer, mercredi, aux rassemblements organisés à l’occasion de la fête de la Révolution tunisienne, en soutien au président Kaïs Saïed et aux manifestations appelées par des coordinations locales favorables à ce dernier.
Or, les vidéos en question ont été filmées par une citoyenne tunisienne qui a capturé des images de touristes algériens à proximité des autobus les transportant. Par ses propres commentaires — et non par des propos tenus par les touristes — elle a volontairement donné l’impression que ces derniers étaient venus prendre part aux célébrations de la fête de la Révolution aux côtés des Tunisiens. Malgré le caractère manifeste de cette manipulation, le média en ligne Mim, dirigé par Somaya Ghannouchi, fille du président du mouvement Ennahdha, a choisi de relayer ces images.
Plusieurs blogueurs et figures politiques opposées aux orientations du président Saïed, parmi lesquels d’anciens responsables gouvernementaux tunisiens, ont emboîté le pas, trouvant dans ces vidéos une occasion d’impliquer l’Algérie dans l’arène politique tunisienne et d’évoquer, sans fondement, une supposée ingérence algérienne dans les affaires intérieures du pays.
Face à cette campagne jugée mensongère et préjudiciable, d’autres voix tunisiennes se sont élevées pour la dénoncer. Le journaliste tunisien Mohamed Latrech a ainsi écrit que « l’instrumentalisation des frères touristes algériens — qui ont sauvé nos saisons touristiques durant la période du Covid et lors du désengagement de plusieurs marchés européens et du Golfe — dans des querelles politiques qui ne les concernent pas constitue une faute morale avant d’être un coup potentiellement fatal pour l’économie nationale ». Il a ajouté que cette « immaturité politique » reflète « l’état de confusion et la pauvreté intellectuelle d’une opposition incapable de proposer une alternative crédible ».
De son côté, l’éditorialiste et journaliste reconnu Kamel Ben Younes a affirmé : « Bienvenue à tous les frères algériens, libyens et à l’ensemble des visiteurs de la Tunisie, qu’ils soient touristes, commerçants ou invités. Rien ne justifie d’entraîner le tourisme arabe et l’économie nationale dans des conflits politiques internes ».
Par ailleurs, plusieurs observateurs notent, depuis un certain temps, l’émergence sur les réseaux sociaux d’un discours ciblant de manière insistante l’Algérie, porté par certaines élites, influenceurs et militants. Ce discours promeut des récits politiques erronés, attribuant à l’Algérie certaines difficultés politiques et économiques tunisiennes liées au processus démocratique, tout en occultant le soutien constant apporté par Alger à la Tunisie depuis la Révolution de 2011, indépendamment des gouvernements successifs. Ce soutien s’est manifesté à plusieurs niveaux, notamment par des aides économiques, énergétiques et sécuritaires, contribuant à stabiliser le pays à des moments critiques.
Selon plusieurs sources, des parties régionales, ainsi que des réseaux organisés, travailleraient à alimenter ce type de campagnes. Des échanges ont notamment été observés par le passé sur l’application TikTok entre des militants tunisiens et marocains évoquant une répartition des rôles et des financements en vue de lancer des opérations de désinformation destinées à fragiliser les relations algéro-tunisiennes, tant sur le plan social que politique, en exploitant de manière opportuniste et contraire à l’éthique des événements ordinaires.
Dans ce contexte, la capitale tunisienne a connu, mercredi, une importante manifestation rassemblant des partisans et soutiens du président Kaïs Saïed, venus de différentes régions du pays. Les manifestants ont exprimé leur rejet des ingérences étrangères et de l’appui recherché par certaines forces de l’opposition auprès de l’étranger, notamment de l’Union européenne. Des portraits du président et des slogans appelant à la lutte contre la corruption, à la reddition des comptes et à l’assainissement de la scène politique tunisienne de toute influence et financement étrangers ont été largement brandis.
