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Mendicité organisée en Algérie : une loi claire, mais difficile à appliquer

Alger – Bien que le Code pénal algérien encadre strictement la lutte contre la mendicité organisée, son application demeure semée d’embûches. Maître Fatma-Zohra Benbrahem, avocate et juriste à la Cour d’Alger, souligne que les textes sont sans équivoque, mais que les obstacles pratiques entravent la répression effective de ce phénomène social préoccupant.

Une législation explicite mais complexe à faire respecter

L’article 195 du Code pénal algérien prévoit des peines d’emprisonnement et des amendes pour toute personne exploitant autrui dans des activités de mendicité. Lorsque les victimes sont des enfants, des personnes handicapées ou âgées, les sanctions sont encore plus sévères.
Cependant, Me Benbrahem insiste : « La difficulté ne réside pas dans la loi, mais dans son application. Identifier les véritables organisateurs de ces réseaux reste une tâche ardue pour les autorités. »

Des dispositifs légaux pour protéger les plus vulnérables

L’Algérie a mis en place plusieurs cadres législatifs et institutionnels pour la protection des personnes vulnérables. « Les enfants, les handicapés et les personnes âgées ont des droits consacrés par la Constitution », rappelle Me Benbrahem.
Les parents sont notamment tenus d’inscrire leurs enfants à l’état civil dès la naissance et de les scolariser à partir de l’âge de six ans. Le non-respect de ces obligations expose à des poursuites pénales. « Il est inadmissible de voir des enfants errer dans les rues alors qu’ils devraient être à l’école », déplore l’avocate.

L’Instance nationale de protection et de promotion de l’enfance, en coordination avec d’autres organismes spécialisés, veille à l’application des droits de l’enfant. Parallèlement, les personnes âgées et handicapées bénéficient d’une couverture médicale et d’aides financières, même si les conditions socioéconomiques difficiles poussent parfois certaines familles à recourir à des pratiques illégales, comme l’exploitation de proches vulnérables pour la mendicité.

Des dérives sociales aux conséquences graves

Selon Me Benbrahem, certaines familles, acculées par la précarité, « instrumentalisent leurs enfants ou leurs parents âgés pour susciter la compassion des passants ». D’autres réseaux plus organisés exploitent des personnes vulnérables dans des activités encore plus graves, comme la prostitution, portant atteinte à la dignité physique et morale des victimes.
Si ces cas demeurent marginaux en Algérie, l’avocate reconnaît l’existence de « groupes criminels bien structurés » qu’il est difficile de démanteler.

Renforcer la prévention et les moyens d’action

Pour Me Benbrahem, la lutte contre la mendicité organisée nécessite un engagement plus fort des pouvoirs publics : « Nous ne faisons pas assez pour démanteler ces réseaux qui utilisent des enfants, des bébés ou des handicapés pour émouvoir le public. »
Elle salue néanmoins les efforts législatifs récents, notamment la loi contre le kidnapping et l’assassinat de mineurs, qui prévoit des sanctions exemplaires. Mais elle appelle à aller plus loin : « Les familles en détresse doivent bénéficier d’un accompagnement social et économique renforcé. C’est en leur garantissant une vie décente que nous pourrons réellement protéger les plus faibles. »

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