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Terres rares : la Chine fait trembler l’industrie mondiale

Par : Darine.N

Terres rares : la Chine fait trembler l’industrie mondiale

Utilisées comme levier dans les négociations commerciales, les restrictions d’exportation chinoises sur les terres rares bouleversent les équilibres industriels mondiaux. Détenant un quasi-monopole sur l’extraction et le raffinage de ces matériaux stratégiques, Pékin renforce son contrôle et s’en sert désormais comme outil de pression géopolitique.

Depuis le durcissement des conditions d’exportation et de réexportation, les entreprises occidentales craignent des surcoûts, des retards et des ruptures dans les chaînes d’approvisionnement. Les tensions sino-américaines, déjà exacerbées par les droits de douane imposés sous l’administration Trump, inquiètent particulièrement le secteur industriel, rapporte le Financial Times, qui souligne que des responsables des deux pays plaident pour une désescalade.

Un instrument de négociation économique

Les premières restrictions, introduites en avril dernier en réponse aux taxes américaines, ont entraîné des ralentissements dans l’automobile et poussé plusieurs entreprises à constituer des stocks stratégiques. À l’automne, la Chine est allée plus loin en imposant aux exportateurs d’obtenir une autorisation spéciale dès lors que leurs produits contiennent plus de 0,1 % de terres rares d’origine chinoise. Tout matériel à usage de défense est, lui, automatiquement interdit d’exportation.

En réaction, Donald Trump a menacé d’appliquer une surtaxe de 100 % sur les produits chinois, une mesure que des analystes du CSIS interprètent comme une tactique de négociation avant son entretien avec le président Xi Jinping.

Une dépendance mondiale critique

La Chine détient 44 millions de tonnes de réserves de terres rares sur un total mondial estimé à 110 millions. Ces matériaux, indispensables à la fabrication des véhicules électriques, turbines éoliennes, radars, missiles et équipements électroniques, sont devenus une ressource stratégique incontournable.

Certaines entreprises, comme la start-up américaine ePropelled, évoquent déjà des hausses de coûts et des retards de production susceptibles de forcer à repenser la conception de leurs produits. Pour réduire sa dépendance, la société a conclu un partenariat avec USA Rare Earth pour créer une usine de fabrication d’aimants, dont 90 % de la production mondiale provient actuellement de Chine.

En Europe, l’Association des industries aérospatiales et de défense (ASD) alerte sur « le besoin urgent de rendre les chaînes d’approvisionnement plus résilientes » et de réduire la dépendance aux minerais critiques.

Des alternatives encore limitées

Pour tenter d’inverser la tendance, une usine d’aimants permanents a été inaugurée en Estonie en septembre. Sa capacité, fixée à 2 000 tonnes par an, pourrait atteindre 5 000 tonnes à terme. L’initiative, portée par Neo Performance Materials, reste toutefois dépendante d’accords d’approvisionnement extérieurs, notamment avec des partenaires australiens.

Depuis l’entrée en vigueur des mesures chinoises, les constructeurs automobiles européens ont multiplié leurs commandes auprès de l’allemand Magnosphere, cherchant à sécuriser leurs besoins en composants magnétiques.

L’Europe en quête d’autonomie stratégique

Face à ces tensions, la Commission européenne prévoit de rencontrer prochainement des représentants chinois pour explorer des issues diplomatiques.

Dans son programme de travail 2026, publié le 21 octobre, Bruxelles annonce la création d’un centre européen dédié aux matières premières critiques, chargé de surveiller les marchés, d’acheter conjointement et de constituer des stocks stratégiques.

Objectif : garantir la sécurité d’approvisionnement et réduire une dépendance devenue un enjeu géopolitique majeur.

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