Approvisionnement et stabilité des prix : le gouvernement lance un système d’information unifié pour anticiper les tensions du marché
Dans l’une de leurs premières actions conjointes depuis la formation du nouveau gouvernement dirigé par Sifi Ghrieb, le ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche, Yacine El-Mahdi Oualid, et la ministre du Commerce intérieur et de la Régulation du marché national, Amal Abdellatif, ont présidé, ce lundi, une importante réunion de coordination. Objectif : renforcer le contrôle de l’approvisionnement du marché national et le suivi des prix des produits agricoles de large consommation.
Un système d’information pour mieux anticiper les fluctuations
À l’issue de cette réunion, tenue en présence de hauts cadres des deux ministères, il a été annoncé la mise en place d’un système d’information unifié permettant le suivi en temps réel des prix agricoles, l’évaluation de la disponibilité des produits, et la prévision des fluctuations du marché.
Ce nouvel outil technologique se veut proactif et stratégique, dans un contexte où le marché algérien est régulièrement exposé à des pénuries soudaines ou hausses de prix inattendues, souvent perçues comme injustifiées par les consommateurs.
D’après le communiqué du ministère de l’Agriculture, ce système vise à centraliser et croiser les données issues de différents acteurs de la chaîne de production et de distribution, afin d’identifier rapidement les tensions, de prévenir les déséquilibres et de guider les décisions de régulation à l’échelle nationale.
Une réponse à une instabilité persistante
Cette initiative fait suite à une forte instabilité des prix agricoles enregistrée durant les années 2024 et 2025, qui a fragilisé le pouvoir d’achat des ménages, particulièrement les plus modestes. Des hausses brutales ont été constatées sur des produits de première nécessité comme les légumes, les viandes rouges, les œufs ou encore la pomme de terre.
Les chiffres de l’Office national des statistiques (ONS) sont édifiants : en mars 2025, l’indice des produits agricoles frais a grimpé de +7% en un seul mois. Les légumes ont connu une hausse de +21,3%, la pomme de terre +22,9%, et les viandes rouges +4%. Ces variations, souvent concentrées sur de courtes périodes, ont mis en lumière le manque d’outils de prévision efficaces.
La crise de la pomme de terre : un cas d’école
L’un des épisodes les plus marquants reste la crise de la pomme de terre d’octobre 2024. Ce produit phare de la consommation nationale avait vu son prix dépasser les 120 DA/kg dans certaines régions, bien au-dessus du seuil raisonnable estimé à 60 à 70 DA/kg.
Face à cette flambée, les autorités ont procédé à un déstockage exceptionnel de 35 000 tonnes, injectées sur le marché à un prix plafonné de 75 DA/kg. Une mesure d’urgence qui a permis de freiner la spéculation, mais qui a également illustré l’absence d’un dispositif d’alerte suffisamment réactif en amont.
C’est dans cette logique que le nouveau système d’information unifié s’inscrit : éviter les mauvaises surprises, détecter les déséquilibres dès leur apparition, et intervenir avant que les tensions n’impactent les consommateurs.
Une cellule de suivi permanente pour garantir la stabilité
En parallèle de ce dispositif numérique, les deux ministères ont annoncé la création d’une cellule de travail permanente. Cette structure aura pour mission de superviser quotidiennement la disponibilité des produits agricoles sur les marchés, de coordonner les actions entre les acteurs publics et privés, et de mettre en œuvre les mesures de régulation nécessaires.
Cette cellule fonctionnera comme une interface dynamique entre les services du ministère de l’Agriculture, ceux du Commerce, les producteurs, les distributeurs et les opérateurs des marchés de gros, afin de garantir une vision partagée et réactive de l’état du marché.
Une approche intégrée pour une politique durable
À travers ces mesures, le gouvernement entend passer d’une gestion réactive des crises à une gouvernance préventive du marché agricole. En combinant les outils numériques à une coordination institutionnelle permanente, il s’agit de rétablir la confiance du citoyen, de protéger son pouvoir d’achat, et de lutter efficacement contre les spéculations abusives.
Ces décisions illustrent aussi une volonté claire du gouvernement Ghrieb de moderniser les mécanismes de régulation économique, en plaçant la donnée, l’analyse prédictive et la coordination au cœur de l’action publique.
La réussite de ce nouveau dispositif dépendra toutefois de la qualité de l’information collectée, de la rapidité de réaction des autorités, et de la capacité à traduire les signaux détectés en décisions concrètes sur le terrain. Un chantier ambitieux, mais devenu indispensable face aux défis structurels du marché alimentaire en Algérie.
