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L’Algérie trace sa voie vers la souveraineté énergétique avec les batteries LFP

Le professeur Karim Zaghib, éminent spécialiste algérien en électrochimie et figure de référence mondiale dans le domaine des technologies de stockage d’énergie, a révélé de nouveaux éléments sur le projet national de développement de batteries lithium-fer-phosphate (LFP), lors d’une intervention diffusée hier sur la Télévision algérienne. Un projet d’envergure qu’il coordonne depuis avril dernier, en étroite collaboration avec le ministère de l’Énergie, des Mines et des Énergies renouvelables, ainsi qu’avec la Société nationale des ressources minières, sur la base d’un mémorandum d’entente stratégique.

Un projet adossé à des ressources nationales

L’ambition est claire : positionner l’Algérie comme un acteur industriel majeur de la transition énergétique mondiale, en valorisant trois ressources naturelles dont le pays dispose en abondance — le lithium, le fer et le phosphore. Ces matériaux, essentiels à la fabrication des batteries LFP, confèrent à ce type de stockage une compétitivité certaine : « Le fer est peu coûteux, le phosphore évite l’inflammation des batteries, et le lithium est une ressource stratégique rare », a résumé Karim Zaghib.

Grâce à cette combinaison, l’Algérie pourrait produire des batteries à la fois sûres, durables et économiquement compétitives, tout en misant sur une chaîne de valeur locale maîtrisée, de l’extraction à la fabrication.

Un programme structuré en phases industrielles

Le projet national se décline en plusieurs étapes industrielles. Dans un premier temps, il s’agira de produire 5 000 tonnes par an de matériau actif à base de lithium-fer-phosphate (cathode), dès les deux ou trois premières années de lancement. Ce développement s’appuie sur une stratégie d’industrialisation progressive et de transformation sur le territoire national.

« Nous avons un programme en trois étapes : d’abord la production de la cathode en poudre, ensuite sa transformation à l’aide d’acide phosphorique, et enfin, le développement d’une filière locale pour l’exploitation du lithium », a expliqué le professeur. L’objectif est d’assurer une autonomie technologique totale, avec une production 100 % algérienne à toutes les étapes.

Vers une voiture électrique algérienne

Ce projet énergétique s’inscrit également dans une vision plus large de développement industriel. Le professeur Zaghib a en effet évoqué la possibilité de voir émerger un véhicule électrique algérien dans un délai de cinq à six ans. Une perspective réaliste selon lui, dès lors que la technologie de la batterie est maîtrisée localement : « Dès que la batterie est prête, la voiture suit naturellement », a-t-il souligné.

Un enjeu de souveraineté nationale

Conscient des enjeux stratégiques du projet, Karim Zaghib a insisté sur la nécessité d’une gestion étatique à travers des entreprises publiques. Selon lui, ce projet touche directement à la sécurité nationale et doit être protégé comme tel. Une équipe d’ingénieurs, de consultants et d’experts algériens, forte de plusieurs décennies d’expérience dans le secteur, est déjà mobilisée pour porter cette ambition.

« Nous avons une stratégie 100 % algérienne. Les premières et deuxièmes transformations des matériaux se feront ici, en Algérie. Le pays possède un sol riche et rare. Nous devons le transformer chez nous, par nous-mêmes », a-t-il martelé.

Des batteries durables… pour un avenir durable

Le professeur a conclu son intervention en insistant sur la durabilité exceptionnelle des batteries LFP, dont la longévité pourrait dépasser les 100 ans. Il a également mentionné la publication récente d’un article scientifique sur la production de phosphates et de lithium en Algérie, illustrant le rôle central que joue la recherche dans cette stratégie industrielle.

Déjà, en avril dernier, après une audience présidentielle, le professeur Zaghib annonçait le potentiel colossal de cette filière, estimant à plus de 50 000 le nombre d’emplois directs qu’elle pourrait générer, et à 100 000 celui des emplois indirects. Un projet industriel, énergétique et humain à la mesure des ambitions d’un pays qui aspire à devenir un acteur-clé de la transition énergétique mondiale.

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