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Filière avicole en Algérie : entre excédents, instabilité des prix et besoin urgent de régulation

La filière avicole algérienne, notamment celle de la production d’œufs de consommation, fait face à des déséquilibres structurels qui ont conduit à des fluctuations marquées des prix sur le marché national. Selon les professionnels du secteur, dont le président du Conseil national interprofessionnel de la filière avicole (CNIFA), El Moumen Kali, une régulation en amont et en aval devient incontournable pour assurer la stabilité du marché et valoriser une production excédentaire.

Exporter pour absorber l’excédent

L’année 2024 a été marquée par une surproduction d’œufs, frôlant les 10 milliards de dinars, alors que les besoins du marché national sont estimés à 6 milliards de dinars. Cette situation a provoqué une baisse drastique des prix, plaçant les éleveurs en situation de perte. «Le coût de revient d’un plateau de 30 œufs varie entre 300 et 400 DA, mais il se vendait à 300 DA, entraînant une perte de près de 100 DA par plateau», explique M. Kali.

Face à cette conjoncture, les autorités ont récemment autorisé l’exportation des œufs, une décision saluée par les professionnels. Cette mesure vise à réduire les pertes subies par les éleveurs et à rééquilibrer l’offre et la demande sur le marché intérieur.

Organiser la filière en deux segments

Pour stabiliser durablement le secteur, les experts proposent de structurer la filière avicole en deux catégories d’éleveurs :

  1. Ceux dédiés à la couverture du marché national, avec un quota maîtrisé de 400.000 à 500.000 reproductrices pondeuses par an.
  2. Ceux orientés vers l’exportation, opérant selon un cahier des charges conforme aux normes internationales et aux exigences des pays importateurs.

Cette segmentation permettrait de prévenir les excédents, d’optimiser les débouchés commerciaux et de valoriser l’investissement des aviculteurs.

Dysfonctionnements à corriger

La filière souffre aussi de déséquilibres structurels. Par exemple, l’Algérie continue d’importer chaque année 700.000 à 800.000 reproductrices, bien au-delà des besoins estimés. De plus, la variation extrême du prix du poussin d’un jour, passant de 10 DA à 250 DA, alimente l’instabilité des coûts de production.

Autre problème signalé : l’abattage prématuré des reproductrices, faute de débouchés, est qualifié de «crime économique» par les spécialistes.

Une filière stratégique à protéger

Le secteur avicole est considéré comme stratégique pour la sécurité alimentaire de l’Algérie. Sa modernisation passe par :

  • une meilleure régulation des importations,
  • la couverture sanitaire du cheptel avicole,
  • une formation des éleveurs,
  • et une planification rigoureuse des opérations d’exportation.

L’Algérie a le potentiel d’atteindre l’autosuffisance tout en devenant exportatrice nette, en particulier vers des marchés demandeurs comme la Libye et l’Arabie saoudite.

La réussite de cette transition dépendra de la volonté des pouvoirs publics à structurer la filière, à instaurer des règles de gestion claires, et à soutenir durablement les producteurs qui assurent, au quotidien, l’alimentation de millions de citoyens.

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