Allocation touristique : un relèvement ambitieux sous haute surveillance monétaire
Entrée en vigueur depuis le 20 juillet, la nouvelle allocation touristique pour les citoyens algériens marque un tournant important dans la politique de change du pays. Fixée désormais à 750 euros par adulte et 300 euros pour les mineurs de plus de 12 ans, cette mesure constitue un relèvement de plus de sept fois par rapport au précédent plafond, longtemps jugé insuffisant par les voyageurs.
Une réponse à une attente forte des citoyens
Longtemps réclamée, cette révision à la hausse répond à un besoin réel : permettre aux Algériens de voyager à l’étranger dans des conditions plus dignes, avec un accès équitable à un minimum de devises pour couvrir leurs frais. Elle traduit aussi une volonté des autorités de rationaliser les pratiques de change, en réduisant l’écart entre les taux officiels et ceux du marché parallèle, tout en favorisant une plus grande transparence dans les opérations de change.
Mais un risque pour les équilibres financiers ?
Cependant, cette hausse substantielle n’est pas sans susciter des inquiétudes quant à son impact sur les finances extérieures du pays. Dans un contexte marqué par la volatilité des prix du pétrole — dont dépend toujours largement l’économie nationale — la gestion des réserves de change demeure un enjeu stratégique.
Même si les excédents de la balance des paiements ont été maintenus ces dernières années, leur tendance est à la baisse, notamment sous l’effet du repli des prix des hydrocarbures. Les prévisions officielles tablent néanmoins sur un solde encore positif en 2025, estimé à 1,17 milliard de dollars, mais les autorités restent prudentes.
Une flexibilité encadrée par des garde-fous
Consciente des risques potentiels, la Banque d’Algérie a intégré dans le cadre réglementaire de cette nouvelle allocation des clauses d’ajustement conditionnel. L’article 11 de l’instruction datée du 17 juillet précise que le montant et les modalités d’octroi peuvent être révisés, si la viabilité de la balance des paiements venait à être compromise.
Cette disposition donne à l’autorité monétaire une marge de manœuvre pour réagir rapidement à un changement conjoncturel, comme une baisse durable des recettes en devises, ou un choc externe imprévu.
Une gestion anticipative et pragmatique
Outre ces mesures préventives, la Banque d’Algérie veille à ce que l’allocation soit utilisée strictement dans le cadre prévu, à savoir les voyages à l’étranger. Des procédures simplifiées mais rigoureuses ont été mises en place pour éviter tout usage détourné. L’objectif est double : protéger les réserves officielles de change, tout en garantissant l’accès équitable aux devises pour les citoyens, sans encourager la spéculation ou la fraude.
Une réforme à suivre de près
Cette réforme constitue un acte de confiance envers les citoyens et un signal d’ouverture sur les plans financier et économique. Mais elle appelle aussi à une grande rigueur dans sa mise en œuvre, et à une surveillance constante des flux de devises sortants.
Dans une économie toujours en transition, où la diversification reste en chantier, la Banque d’Algérie maintient donc une approche prudente et conditionnée, pour concilier souplesse conjoncturelle et stabilité macroéconomique.
En résumé : l’allocation touristique revue à la hausse représente une avancée sociale importante, mais elle s’inscrit dans un équilibre délicat. Sa pérennité dépendra de l’évolution des revenus extérieurs du pays, de la discipline dans son usage, et de la capacité des autorités à ajuster leur politique en temps réel, en fonction de la conjoncture économique et financière mondiale.