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La flotte russe de l’ombre défie les sanctions européennes : le pétrole continue d’affluer vers l’Inde et la Chine

Par : Amani H.

Malgré un nouveau train de sanctions imposé par l’Union européenne dans le cadre de sa stratégie visant à affaiblir l’économie de guerre russe, la « flotte de l’ombre » de Moscou poursuit ses exportations de pétrole brut vers l’Inde et la Chine. Cette situation met en lumière les nombreuses failles du régime de sanctions occidentales.

Un contournement bien organisé

Depuis le début du conflit en Ukraine, la Russie a mis en place un réseau parallèle de transport maritime afin d’échapper aux plafonds de prix et aux contrôles des pays du G7. Cette « flotte de l’ombre » est constituée de navires vieillissants, immatriculés sous des pavillons de complaisance, souvent non assurés selon les standards internationaux.

Ces navires pratiquent régulièrement des manœuvres d’évitement, comme les transferts de cargaison en haute mer, les changements fréquents de nom ou l’extinction volontaire de leurs dispositifs de géolocalisation. Cela complique considérablement la traçabilité des flux pétroliers et entrave l’application des sanctions.

Un nouveau paquet de sanctions encore insuffisant

Le 18ᵉ paquet de sanctions adopté par l’Union européenne comprend plusieurs mesures destinées à renforcer le contrôle des exportations énergétiques russes :

• L’ajout de 105 navires à la liste des bâtiments sanctionnés ;

• La fixation d’un nouveau plafond de prix « flottant » pour le pétrole brut russe, fixé à 15 % en dessous du prix du marché mondial ;

• Des restrictions supplémentaires visant les entités étrangères facilitant le commerce illicite de pétrole russe ;

• Des interdictions d’accostage pour les navires suspectés de violer les règles de l’embargo.

Cependant, selon plusieurs experts en commerce maritime, ces mesures peinent à produire un effet dissuasif concret.

Exemple révélateur : le pétrolier Andromeda

Le pétrolier Andromeda, déjà inscrit sur la liste noire de l’UE depuis décembre 2024, a récemment effectué son quatrième trajet entre le port russe d’Oust-Louga et la raffinerie indienne de Jamnagar. Le navire, qui bat pavillon comorien, a transporté près de 3 millions de barils de pétrole brut, générant à lui seul plus de 150 millions de dollars de revenus pour la Russie, selon la société de suivi Kpler.

Ce cas illustre la difficulté à faire appliquer efficacement les sanctions, notamment dans les pays tiers qui ne reconnaissent pas le plafond de prix occidental.

Le rôle ambivalent de l’Inde et de la Chine

L’Inde et la Chine demeurent les principaux clients du pétrole russe depuis la mise en place de l’embargo européen. Officiellement, ces pays affirment agir dans le respect de leur souveraineté énergétique, tout en achetant du pétrole à prix réduit. Or, une partie de ce pétrole est ensuite raffinée localement avant d’être réexportée vers d’autres marchés, y compris européens, sous forme de produits dérivés non sanctionnés.

Malgré les avertissements répétés de l’Union européenne et de ses alliés, aucune sanction secondaire majeure n’a été appliquée jusqu’à présent contre ces partenaires asiatiques, ce qui fragilise la crédibilité du dispositif.

Des risques croissants pour la sécurité maritime

Outre les considérations économiques et géopolitiques, la flotte de l’ombre soulève également des préoccupations environnementales. Ces navires, souvent en mauvais état et mal entretenus, présentent un risque élevé d’incidents en mer : collisions, fuites de pétrole ou explosions. En l’absence d’assurance conforme, les dégâts causés à l’environnement pourraient rester sans réparation.

Une pression internationale encore limitée

Alors que les pays du G7 envisagent de renforcer les contrôles sur les sociétés de courtage, d’assurance et de certification maritime, les analystes estiment que la réussite d’une telle stratégie dépendra d’une coopération internationale plus large, incluant notamment les grandes économies émergentes.

Tant que l’accès à des marchés comme l’Inde et la Chine reste ouvert pour le pétrole russe, les sanctions occidentales auront un effet limité. Le défi pour l’Union européenne n’est donc pas seulement technique, mais aussi diplomatique.

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