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Sergueï Lavrov ravive la controverse sur les frontières algéro-maliennes

Par : Darine.N

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a récemment suscité un vif débat après avoir qualifié les frontières entre l’Algérie et le Mali d’« artificielles ». Une déclaration qui, bien que passée sous silence par la diplomatie algérienne, a provoqué une onde de réactions sur les réseaux sociaux.

Selon Lavrov, ces frontières héritées de la colonisation sont à l’origine de nombreux conflits en Afrique, notamment celui opposant Alger et Bamako. Il a également évoqué le rôle du peuple touareg et les tensions persistantes dans la région des Grands Lacs, tout en soulignant que ces divisions tracées par les puissances coloniales continuent d’alimenter les instabilités du continent.

Cette sortie a eu lieu lors d’une conférence de presse retransmise par Sputnik Afrique, au cours de laquelle Lavrov a d’abord défendu la présence militaire russe au Mali, avant de glisser vers une analyse historique plus politique. Selon lui, « les frontières coloniales ont fragmenté des peuples, notamment les Touaregs, et ceux qui les ont dessinées continuent d’en exploiter les failles ».

Or, cette remarque touche à un principe fondamental de la diplomatie algérienne : le respect absolu des frontières héritées de la décolonisation, considéré comme un pilier de l’intégrité territoriale du pays depuis son indépendance. En évoquant leur caractère « artificiel », Lavrov remet implicitement en cause un dogme historique et politique majeur pour Alger.

Plusieurs observateurs y voient un message géopolitique calculé. La Russie, en quête d’influence accrue au Sahel, semble vouloir redéfinir son positionnement en Afrique, quitte à froisser un partenaire de longue date. Certains y lisent aussi une volonté de Moscou de s’affirmer face à l’Occident en s’appropriant le discours postcolonial.

Le député indépendant Abdelouahab Yakoubi a d’ailleurs réagi vivement : « Cette lecture biaisée de l’histoire cherche à légitimer une présence russe dans une zone qui n’a jamais fait partie de son espace géostratégique. Nous n’avons reçu de Moscou que des slogans, des contrats d’armement et une dépendance technologique », a-t-il déclaré.

Pour l’heure, Alger n’a entrepris aucune démarche officielle, ni convoqué l’ambassadeur russe. Ce silence, souvent interprété comme une prudence stratégique, pourrait témoigner de la volonté d’éviter une escalade diplomatique dans un contexte international tendu.

Mais cette séquence marque sans doute un tournant : elle révèle les nouvelles nuances dans la relation entre Moscou et Alger, autrefois alliés stratégiques unis par une méfiance commune envers l’Occident. En mobilisant le récit colonial à des fins diplomatiques, la Russie prend le risque d’ébranler un principe fondateur de la politique étrangère algérienne celui de l’intangibilité des frontières issues de la décolonisation.

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