Pourquoi le cours de l’or continue de s’envoler
L’or a dépassé mercredi la barre symbolique des 4.000 dollars l’once, seuil improbable il y a encore un an
est bien connu, l’or, en temps de crise, est une valeur refuge. Alors rien d’étonnant, (mais inquiétant) à ce que l’once d’or a dépassé mercredi la barre symbolique des 4.000 dollars, un seuil improbable il y a encore un an, alors que les choses n’allaient pas forcément très bien déjà.
Une envolée de plus de 40 % en un an
Ça n’arrête pas depuis fin 2020. La barre des 2.000 dollars l’once a été franchie pour la première fois en août 2020, au moment de la pandémie de Covid-19. Le métal a ensuite fluctué autour de cette valeur jusqu’en 2024 où son cours a subitement explosé : il a passé les 2.500 dollars en août 2024, puis les 3.000 dollars en mars dernier, avant les 3.500 dollars en septembre. Il a, enfin, franchi les 4.000 dollars ce mercredi dans les échanges asiatiques. « Les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’or a déjà augmenté de plus de 40 % en 2025 et se dirige vers une troisième année consécutive de gains à deux chiffres », relève Stephen Innes, de la société de gestion SPI Asset Management.
Pas de risque de perdre son argent
Un engouement pour l’or considéré depuis toujours comme une « valeur refuge » par excellence car il conserve sa valeur intrinsèque, bien qu’il ne rapporte pas d’intérêts. Convoité pour son utilisation dans la joaillerie, l’industrie ou comme actif de réserve, les investisseurs se tournent vers lui pour se protéger contre le risque de perdre de l’argent quand ils anticipent des perspectives moroses.
L’effet chamboule-tout de Donald Trump
L’imprévisibilité des décisions du président américain depuis son retour au pouvoir en janvier a eu un impact considérable, à commencer par sa politique commerciale et les menaces de droits de douane, notamment contre l’Union européenne et la Chine, qui ont chamboulé l’économie mondiale. L’or a également été porté par les pressions du président américain sur la Réserve fédérale (Fed), la banque centrale américaine, pour qu’elle abaisse ses taux, faisant peser un doute sur son indépendance. Autant d’éléments qui affaiblissent le dollar, une autre valeur refuge traditionnelle, qui alimentent le risque d’inflation et incitent à se tourner vers l’or. Enfin, le blocage budgétaire en cours, « shutdown », aux Etats-Unis, constitue un dernier coup de fouet au métal jaune.
Incertitudes en Europe et engouement des banques
Et il n’y a pas qu’un effet Trump qui amène à doper les cours de l’or. L’Europe n’est pas en reste avec la crise politique en France, deuxième économie européenne, qui exacerbe également le climat d’incertitude. Autre inquiétude sur « le vieux continent », la ruée vers l’or a en toile de fond été alimentée ces derniers mois par les craintes continues liées à la guerre en Ukraine, commencée en février 2022, mais aussi, il faut le reconnaître, à la situation au Proche-Orient depuis le 7 octobre 2023. Après l’invasion lancée par Moscou début 2022, les réserves de change de la banque centrale russe détenues à l’étranger ont été gelées, faisant gonfler les cours de l’or. La guerre en Ukraine a aussi renforcé l’engouement des banques centrales pour le précieux métal : elles remplissent leurs coffres de lingots afin de se couvrir en cas de coup dur, stabiliser leur devise, ou encore comme garantie pour des prêts et des transactions.
Marchés à la hausse et diversification
La progression de l’or se produit sur des marchés globalement en hausse : les Bourses progressent, avec des valorisations élevées, et du côté des cryptomonnaies, le bitcoin a battu ce week-end un nouveau record. « Il semble y avoir beaucoup de liquidités disponibles » de la part des investisseurs qui « continuent de rechercher la diversification », souligne Chris Beauchamp, analyste chez IG. L’or apparaît ces temps-ci comme un meilleur instrument de diversification que les achats de dette publique des Etats, devenus plus risqués. Dans ce contexte, « les investisseurs mondiaux se retrouvent confrontés à une insoutenable » peur de rater quelque chose « , en anglais « Fomo », ou « fear of missing out », souligne Ipek Ozkardeskaya, analyste principale chez Swissquote Bank.
