L’Algérie à l’Africa Energy Week : une ambition énergétique portée par 50 milliards de dollars d’investissements
Par : Amani H.
L’Algérie participera à cette édition de la Conférence Africa Energy Week (AEW), prévue du 29 septembre au 3 octobre à Cape Town, en Afrique du Sud. Cet événement majeur, qui réunira les principaux acteurs du secteur énergétique africain et mondial, constitue une vitrine stratégique pour le pays, qui entend y présenter les grandes lignes de sa nouvelle politique énergétique.
Cette présence s’inscrit dans une dynamique d’investissement sans précédent, avec un plan d’engagement financier de 50 milliards de dollars prévu entre 2024 et 2028. Ce programme ambitieux vise à renforcer les capacités de production d’hydrocarbures, accélérer la diversification énergétique, moderniser les infrastructures et stimuler les partenariats avec les investisseurs internationaux.
Une stratégie impulsée par le président Tebboune
Portée par une vision présidentielle claire, la stratégie énergétique de l’Algérie repose sur une série de réformes économiques et réglementaires structurantes. Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a fait du secteur énergétique un levier central de la croissance économique et de l’influence géopolitique du pays.
La politique actuelle vise à consolider le rôle de l’Algérie comme fournisseur énergétique fiable, tout en amorçant une transition vers des énergies plus durables. Pour cela, le gouvernement a mis en place un cadre législatif modernisé, destiné à rendre le secteur plus attractif pour les investisseurs étrangers.
La loi sur les hydrocarbures adoptée en 2019 a été une avancée majeure. Elle offre un environnement fiscal plus souple, une meilleure répartition des risques et une plus grande transparence dans les procédures contractuelles. Depuis son entrée en vigueur, l’Algérie a constaté un regain d’intérêt de la part des grandes compagnies internationales.
Hydrocarbures : relance de l’exploration et de la production
Dans ce contexte, Sonatrach, la compagnie nationale des hydrocarbures, joue un rôle de premier plan. Entre 2024 et 2025, elle s’est vu attribuer 11 nouvelles concessions pétrolières terrestres, couvrant des superficies allant de 4.740 à près de 50.000 km². Ces blocs sont situés dans des bassins hautement prometteurs tels que le Sud-Ouest et le Sud-Est du pays.
Ces concessions, octroyées par l’Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures (ALNAFT), s’inscrivent dans une stratégie de diversification du portefeuille national, mêlant actifs « greenfield » (encore inexplorés) et « brownfield » (déjà exploités). L’objectif est double : accroître la production domestique et attirer un plus grand nombre d’investisseurs étrangers à travers des appels d’offres transparents et compétitifs.
L’Algérie a par ailleurs renforcé sa coopération avec plusieurs compagnies pétrolières internationales. ExxonMobil et Chevron se sont engagés dans le développement des bassins d’Ahnet, de Gourara et de Berkine. De leur côté, Eni et Equinor participent à la réhabilitation des gisements d’In Salah et d’In Amenas, tandis que TotalEnergies concentre ses efforts sur le développement du gisement de Timimoun.
En parallèle, Sonatrach poursuit ses propres investissements, notamment sur le champ pétrolier de Zarzaitine et à travers la relance des opérations du complexe gazier d’Alrar. En 2024, la compagnie a annoncé huit découvertes d’hydrocarbures, témoignant du potentiel encore largement exploitable du sous-sol algérien. Elle vise une production quotidienne de 1,2 million de barils en 2025.
Hydrogène vert : une nouvelle frontière stratégique
Au-delà des hydrocarbures, l’Algérie entend s’imposer comme un acteur incontournable dans le domaine de l’hydrogène vert, une énergie propre appelée à jouer un rôle clé dans la transition énergétique mondiale. Le président Tebboune a d’ailleurs fait du développement de cette filière un axe prioritaire de la politique énergétique nationale.
Le projet emblématique dans ce domaine est le SoutH2 Corridor, un réseau de 3.300 kilomètres de pipelines destiné à transporter de l’hydrogène vert produit en Algérie vers les marchés européens. Ce corridor énergétique innovant repose en grande partie sur la reconversion d’infrastructures existantes de gaz naturel, permettant ainsi une réduction des coûts et une mise en œuvre accélérée.
La capacité prévue de transport s’élève à quatre millions de tonnes d’hydrogène par an, avec un lancement des opérations envisagé pour 2030. Ce projet, développé en partenariat avec des acteurs européens, répond à une demande croissante de solutions énergétiques décarbonées sur le Vieux Continent, tout en valorisant les ressources naturelles stratégiques de l’Algérie.
Une vision panafricaine et durable
La participation de l’Algérie à l’Africa Energy Week s’inscrit également dans une volonté d’intégration régionale et de coopération Sud-Sud. Le thème de l’édition 2024, « Invest in African Energies », trouve un écho direct dans la stratégie algérienne, qui mise sur une approche collaborative pour bâtir des réseaux énergétiques durables sur le continent.
Lors de la conférence, la délégation algérienne présentera les piliers de cette politique : développement des capacités d’exploration, modernisation du cadre réglementaire, attractivité pour les investissements étrangers, diversification des ressources, et engagement pour une transition énergétique juste.
Avec cette approche intégrée, l’Algérie se positionne non seulement comme un fournisseur majeur d’énergie, mais aussi comme un catalyseur de croissance économique et de développement technologique en Afrique.
Un hub énergétique en devenir
La transformation en cours du secteur énergétique algérien pourrait bien faire du pays un modèle pour d’autres nations africaines dotées de ressources similaires. La combinaison entre richesse naturelle, volonté politique, ouverture aux investisseurs et vision long terme donne à l’Algérie les moyens de ses ambitions.
Comme l’a récemment souligné NJ Ayuk, président exécutif de l’African Energy Chamber, l’Algérie incarne aujourd’hui un marché concurrentiel, stable et tourné vers l’avenir. Son engagement en faveur de l’hydrogène vert, ses réformes législatives et ses projets structurants la placent en position de leadership sur le continent.
À l’heure où le monde énergétique se redessine, l’Algérie s’impose ainsi comme un acteur stratégique incontournable, à la croisée des enjeux géopolitiques, économiques et environnementaux.