L’Algérie amorce un virage économique majeur vers la diversification, selon la Banque mondiale
Longtemps tributaire des hydrocarbures, l’Algérie engage une transformation en profondeur pour réduire sa dépendance au pétrole et au gaz, et stimuler la diversification de son économie. Dans un article récemment publié, la Banque mondiale met en lumière les avancées du pays, tout en soulignant les défis à relever pour assurer une croissance durable et inclusive.
Alors que plus de 90 % des recettes d’exportation de l’Algérie provenaient historiquement du secteur pétrolier, les réformes engagées commencent à produire des effets tangibles, selon la mise à jour économique pour le second semestre 2024. Toutefois, l’institution financière internationale estime que le portefeuille d’exportations reste encore limité, d’où la nécessité de poursuivre et d’amplifier les efforts de diversification.
Au cœur de cette transformation se trouve l’Algérien Port Community System (APCS), mis en place en juillet 2021 avec le soutien technique de la Banque mondiale. Ce système vise à moderniser les échanges commerciaux en facilitant les opérations portuaires. « L’APCS marque un tournant pour le commerce algérien », affirme Meriem Ait Ali Slimane, économiste principale à la Banque mondiale. « Il montre comment des réformes ciblées peuvent avoir un impact économique transformateur. »
Autre avancée majeure : la loi sur l’investissement de 2022, conçue pour attirer capitaux nationaux et étrangers. Cette législation introduit des mesures incitatives telles que des exonérations fiscales, la simplification des procédures administratives et l’accès facilité au foncier. Elle est mise en œuvre à travers l’Agence Algérienne de Promotion de l’Investissement (AAPI), qui a déployé une plateforme numérique pour accompagner les investisseurs. La Banque mondiale a activement soutenu l’AAPI par des formations et des recommandations stratégiques, notamment sur l’attraction des investissements directs étrangers (IDE) et le développement de secteurs exportateurs.
Le secteur agricole bénéficie lui aussi d’un accompagnement ciblé. La Banque mondiale note des progrès en matière d’exportation de produits frais, grâce à des études de marché, des évaluations de chaînes de valeur et un dialogue renforcé entre acteurs publics et privés. Dans l’industrie, des initiatives similaires ont concerné des filières comme le liège et la mécanique de précision, appuyées par des programmes de formation et des visites d’échange visant à améliorer les compétences et la coordination sectorielle.
Dans le domaine de la normalisation, l’organisme national d’accréditation ALGERAC a vu le nombre de laboratoires accrédités passer de 77 en 2021 à 135 en juillet 2024, soit une hausse de 75 % en trois ans. Ce progrès s’inscrit dans le cadre d’un plan stratégique quinquennal élaboré avec l’appui de la Banque mondiale.
Malgré ces avancées, l’Algérie devra composer avec les défis posés par la transition énergétique mondiale, en particulier les risques liés au Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) de l’Union européenne, qui menace les exportations à forte intensité carbone comme les engrais et le ciment.
Face à cette nouvelle donne, la Banque mondiale recommande à l’Algérie de verdir ses processus industriels, d’introduire une tarification du carbone, de diversifier ses débouchés à l’exportation et de renforcer les chaînes de valeur dans des secteurs à fort potentiel, notamment les énergies renouvelables et les technologies de l’information.
« L’Algérie dispose d’un potentiel considérable pour s’intégrer dans les chaînes de valeur mondiales », conclut Kamel Braham, représentant résident de la Banque mondiale à Alger. « Le véritable défi réside désormais dans la levée des barrières structurelles et le renforcement de la compétitivité pour capitaliser sur les acquis actuels. »